France
Cadre juridique
En vertu de l’article 2 de la Constitution, « La langue de la République est le français ». Déclinaison de ce principe constitutionnel, la loi du 4 août 1994 relative à l’emploi de la langue française crée un « droit au français » applicable dans plusieurs domaines.
L’information relative aux biens et services proposés aux consommateurs (modes d’emploi, notices d’utilisation, factures, garanties, etc.) ainsi que la publicité qui en est faite doivent être en langue française.
Différents documents nécessaires à l’intégration du salarié dans l’entreprise (contrats de travail, règlements intérieurs, documents de maintenance, etc.) doivent être rédigés en langue française.
Aux termes de la loi du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, la maîtrise de la langue française est reconnue comme une compétence professionnelle et son apprentissage peut bénéficier des dispositifs de la formation continue.
Le français est la langue dans laquelle sont dispensés les cours et les examens.
Tout participant à un colloque scientifique se déroulant en France a le droit de s’exprimer en français et de disposer d’un programme en français.
L’inobservation des dispositions relatives à la consommation, au travail et aux sciences est assortie de sanctions pénales. Il s’agit de contraventions passibles d’amendes dont le montant unitaire maximum est de 750 euros. Le juge peut faire application du principe de cumul et prononcer autant d’amendes que de produits en infraction.
L’ensemble des services audiovisuels émettant depuis le territoire national sont tenus de respecter la langue française et de contribuer au développement de la francophonie. Toutefois, le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 29 juillet 1994, a estimé que le législateur, eu égard à la liberté fondamentale de pensée et d’expression, proclamée par l’article 11 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, ne pouvait imposer l’usage d’une terminologie officielle aux organismes de radiodiffusion sonore et télévisuelle, qu’ils soient publics ou privés.
Tous les agents de l’État doivent recourir à la langue française dans le cadre de leur activité professionnelle, en France et, dans la mesure du possible, à l’étranger. Ils sont tenus d’utiliser les termes et expressions français approuvés par la Commission générale de terminologie et publiés au Journal officiel. Toutefois, il n’existe pas de sanction, ni pénale, ni administrative, à l’encontre des fonctionnaires qui contreviendraient à ces règles.
La législation française a également pour but de promouvoir le plurilinguisme.
La loi de 1994 prévoit que lorsqu’une administration traduit une information qu’elle destine au public (annonce, signalisation, présentation sur un site internet), elle doit le faire en au moins deux langues étrangères. La loi fixe également comme objectif à l’enseignement la connaissance de deux langues autres que le français.
Une proposition de loi, visant à compléter la loi de 1994 et à apporter des garanties supplémentaires à son application, a été adoptée à l’unanimité le 10 novembre 2005 par le Sénat. Elle concerne notamment les enseignes dans les lieux publics, les annonces dans les transports internationaux et les dénominations sociales des sociétés. Une disposition du texte proposé étend aux associations agréées de défense des consommateurs la capacité d’exercer les droits reconnus à la partie civile déjà dévolus aux associations de défense de la langue française.
Cette proposition a été déposée le 4 juillet 2007 à l’Assemblée nationale, mais n’a pas encore fait l’objet d’une inscription à son ordre du jour.
Éventuels contentieux avec la Commission européenne concernant notamment les textes nationaux permettant d’assurer aux consommateurs une information dans sa langue
L’obligation légale d’emploi du français dans l’information relative aux biens, produits et services commercialisés sur le territoire national (article 2 de la loi du 4 août 1994) est critiquée par la Commission européenne.
Sur la base de la jurisprudence de la Cour de justice des communautés européennes, la Commission estime que cette obligation, par son caractère général, excède la proportionnalité que sont tenues de respecter les législations nationales entre l’exigence de libre circulation des biens au sein de l’Union et celle de protection des consommateurs.
Une instruction, publiée par le Bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes a donc été élaborée à l’intention des services de contrôle afin que soit respecté le principe de proportionnalité.
Dispositif institutionnel chargé de concevoir, mettre en œuvre et contrôler ces législations linguistiques
La coordination de l’application de notre droit est assurée par la délégation générale à la langue française et aux langues de France, qui est un service à vocation interministérielle du ministère de la Culture et de la Communication. Les contrôles portant sur l’application des textes légaux sont, quant à eux, assurés par les services de l’État et les organismes publics ou privés compétents. Ainsi, ce sont les services du ministère de l’Économie et des Finances (direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes, direction générale des douanes et droits indirects) qui veillent à l’information en français des consommateurs. Ce sont les services du ministère chargé du travail qui contrôlent l’application des dispositions relatives à la protection des salariés.
Le Conseil supérieur de l’audiovisuel, autorité administrative indépendante, veille à la défense et à l’illustration de la langue française dans la communication audiovisuelle et, à ce titre, vérifie le respect des obligations envers la langue française contenues dans les cahiers des missions et des charges des sociétés nationales de radio et de télévision, et dans les décisions d’autorisation des diffuseurs privés (chaînes privées hertziennes, chaînes du câble et du satellite, radios privées).
Le Bureau de vérification de la publicité, organisme d’autodiscipline interprofessionnelle, exerce un contrôle obligatoire, avant diffusion, de l’ensemble des messages publicitaires télévisés.
Dispositions juridiques concernant l’intégration linguistique des migrants et dispositifs publics de formation linguistique proposés à ceux-ci
Les différentes dispositions prises par la loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à l’acquisition de la nationalité, et par la loi du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale ont été reprises et modifiées par la loi du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration. Cette politique d'intégration vise notamment à renforcer les parcours d'intégration jusqu'à la citoyenneté française, en faisant de la maîtrise de la langue française la base et le moteur du processus d'intégration.
Le contrat d’accueil et d’intégration (CAI), mis en place de façon expérimentale à partir du 1er juillet 2003 a été généralisé à l'ensemble du territoire national à la mi-2006. La signature de ce contrat par les nouveaux arrivants souhaitant s’installer durablement sur le territoire français est obligatoire depuis le 1er janvier 2007. Ce dispositif offre des formations en français aux migrants avec lesquels la communication est jugée impossible ou difficile afin de leur permettre d’atteindre un niveau minimal de maîtrise du français. Ce niveau a été fixé à l’échelon intermédiaire A1.1 du Cadre européen commun de référence pour les langues, et l’apprentissage en est sanctionné par une certification nationale, le Diplôme initial de langue française (DILF).
Depuis 2004, un dispositif national de formation linguistique a été mis en place à l’intention des personnes demandant leur naturalisation et dont le niveau de maîtrise de français est jugé insuffisant.
Pour la conduite de ces actions, la direction de la population et des migrations du ministère de l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Codéveloppement s’appuie sur deux grands opérateurs : l’ANAEM (Agence nationale de l’accueil des étrangers et des migrations) et l’ACSÉ (Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité des chances).
Un projet de loi relatif à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile, en cours d’examen par les assemblées, prévoit que le ressortissant étranger de plus de 16 ans pour lequel le regroupement familial est sollicité bénéficie, dans son pays de résidence, d’une évaluation de son degré de connaissance de la langue française. Si cette évaluation en établit le besoin, l’autorité administrative organise à l’intention de l’étranger, dans son pays de résidence, une formation dont la durée ne peux excéder deux mois. Le bénéfice du regroupement familial est subordonné à la production d’une attestation de cette formation.
Les actions particulières prévues pour l’accueil et la scolarisation des élèves non-francophones nouvellement arrivés en France (ENAF) disposent maintenant d’un cadre législatif défini aux articles 27 et 31 de la loi du 23 avril 2005 et intégré dans le code de l’éducation, respectivement aux articles L.321-4 (3e alinéa) et L.332-4 (2e alinéa).
L’organisation de telles actions s’appuie sur les dispositifs définis par les circulaires de mars et avril 2002 qui ont pour finalité de créer, pour les enfants et les adolescents issus de l’immigration et non-francophones, les conditions d’une intégration la plus rapide possible dans des classes ordinaires, en leur offrant à la fois un enseignement intensif de la langue française et une approche « immersive » du « français scolaire ». Divers dispositifs sont prévus en fonction de l’âge des élèves concernés, de leurs effectifs et de leur répartition sur un territoire donné.
Principales dispositions juridiques en vigueur concernant l’utilisation des langues régionales ou minoritaires
Soucieuse de conduire une politique linguistique équilibrée, la France a signé, le 7 mai 1999, la Charte européenne des langues régionales et minoritaires. Saisi par le Président de la République, le Conseil constitutionnel a estimé qu’aucun des engagements concrets souscrits par la France, au titre de la partie III de la Charte, ne méconnaissait les normes constitutionnelles françaises. En revanche, il a estimé que certaines clauses de la Charte étaient contraires aux principes d’indivisibilité de la République, d’égalité devant la loi et d’unicité du peuple français dans la mesure où elles tendent à conférer des droits spécifiques à des groupes linguistiques à l’intérieur de territoires dans lesquels ces langues sont pratiquées. Ces clauses sont également contraires à l’article 2 de la Constitution, car elles créent un droit à employer d’autres langues que le français dans la vie publique, notion dans laquelle la Charte inclut la justice, les autorités administratives et les services publics.
D’une manière générale, en France, les organismes et institutions de promotion des langues régionales ou minoritaires estiment que celles-ci souffrent de l’absence de statut légal. Néanmoins, leur enseignement bénéficie d’une intégration dans l’enseignement de langues vivantes proposé aux familles. Cet enseignement s’inscrit dans le contexte créé par la décision du Conseil d’État du 29 novembre 2002 annulant deux textes relatifs à la mise en place d’un enseignement bilingue par immersion dans les écoles, collèges et lycées « langues régionales ». Le Conseil d’État a estimé que les prescriptions contenues dans ces textes allaient au-delà des nécessités de l’apprentissage d’une langue régionale et excédaient ainsi les possibilités de dérogation à l’obligation d’user du français comme langue d’enseignement. L’arrêté du 12 mai 2003 tient compte de cette décision en organisant l’enseignement bilingue sur la base de la parité horaire entre la langue régionale et le français, sans qu’aucune discipline puisse être enseignée exclusivement en langue régionale.
Enfin, la loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école du 23 avril 2005 conditionne l’enseignement des langues régionales à la signature de conventions entre l’État et les collectivités territoriales.
Dans ce cadre, l’accent doit être mis sur le dynamisme de l’enseignement des langues régionales en France. Ainsi, durant l’année scolaire 2005-2006, plus de 400 000 élèves du primaire et du secondaire (école, collège et lycée) ont reçu un enseignement de langue régionale.
Enseignement des langues étrangères au sein du système éducatif
La norme est l’enseignement de deux langues vivantes. Une initiation à une langue est proposée durant les quatre dernières années du primaire (fin du cycle 2 et cycle 3). Dans le secondaire, la LV1 est enseignée de la 6e à la Terminale, à raison de trois heures/semaine. À partir de la classe de quatrième, une LV2 s’ajoute à la LV1, jusqu’en Terminale (trois heures/semaine). Le baccalauréat, qui sanctionne la fin des études secondaires, comporte une épreuve écrite obligatoire et une épreuve orale sous certaines conditions d’admissibilité. L’épreuve de langue au baccalauréat offre aux candidats le choix entre plus d’une cinquantaine de langues, même si dans la pratique ce sont très majoritairement l’anglais (LV1) et l’espagnol (LV2) qui sont choisis. Dans un certain nombre d’établissements du second degré sont ouvertes des sections européennes ou de langues orientales, qui offrent un enseignement renforcé de la langue étrangère et sanctionnent cette option au baccalauréat par une épreuve orale spécifique ; en 2005 (derniers chiffres connus), on comptait 181 486 élèves inscrits dans ces sections européennes.
(2009)